Alice avait été surprise lorsqu'elle avait découvert qu'elle avait encore la possibilité de faire son entrée dans une église. C'était bien l'une des rares chose qu'elle avait trouvée positive depuis le début de sa malédiction, de voir que dieu ne l'avait peut-être pas encore complètement abandonnée. Elle continuait de se bercer par cette naïve illusion, comme si le paradis accueillait des monstres comme elle. Aurait-elle l'occasion de redevenir "humaine" et d'aller le rejoindre ? Elle l'ignorait, mais elle ferait tout pour essayer ne pas finir en enfer.

Elle répétait l'une de ses prière favorite lorsqu'un frisson désagréable s’empara de son corps, encore plus intense que ceux qu'elle avait préalablement ressenti. Elle le savait, Gidéon était en ville, mais elle avait espéré qu'il ne vienne pas à elle. Le bruit caractéristique de sa démarche derrière elle la fit fermé les yeux et se concentrée sur sa prière encore plus. Il était sans aucun doute la dernière personne qu'elle voulait voir et surtout, elle considérait qu'il n'avait aucun droit de se trouver en ce lieu sacré. Elle avait beau tenter de se concentrer, elle pouvait sentir son regard figé sur elle. «Crois tu qu’il existe vraiment quelqu’un là haut pour t’entendre, Alice ?» Elle resta muette un instant avant de répliquer en un murmure que ses oreilles développées entendraient facilement.

« Pourquoi venir en ce lieu alors. »

Elle ignorait le nombre d'années exactes qui s'étaient écoulés depuis leur dernière rencontre, mais elle en gardait un souvenir très pénible. Elle détestait cet homme de tout son être pour ce qu'il lui avait fait, mais surtout pour ce qu'il n'avait pas fait. Le contacte de leurs regards lui fit presque mal, elle savait qu'une infant était fait pour aimer son sir de tout son être et inversement et d'aller contre cette nature était terriblement douloureux pour la fragile vampire. «Allons Alice. Ou sont des manières ? Est ce une façon d’accueillir son sire ?»

« Je n'ai pourtant jamais eu l'impression que vous vouliez de ce titre... »

En même temps, elle baissait lentement la tête pour faire une révérence. Elle se retourna afin de faire son signe de croix puis se leva en arrêtant dans la rangé de son créateur.

« Allons dehors, vous voulez bien ? »

Elle ne voulait rester dans un lieu aussi mystique pour elle en sa compagnie et en même temps elle ne voulait pas lui demander trop expressément de sortir, consciente que le monstre qu'il était en profiterait beaucoup trop pour la faire souffrir davantage.

Elle espérait que sa feinte pourrait fonctionner et pourtant elle comprit rapidement que son plan était voué à l'échec. Elle le regarda un instant alors qu'il l'invitait à s'asseoir à ses côtés, demeurant immobile. Gidéon n'avait jamais fait quelconque geste qui pouvait motiver à ses yeux un réel envie de connaître son monde. Elle ne parvenait tout simplement pas à faire confiance à son créateur et pourtant elle savait que de partir ne ferait que d'augmenter son envie de jouer avec elle, après un sourire sans joie, elle vint se glisser contre le banc et prendre place à ses côtés, fixant l'autel, priant son seigneur de la sortir de cet endroit. Voir son créateur s'installer de la sorte la fit également prier pour qu'on lui pardonne les mauvaises manies de son sir. Elle continuait de fixer l'autel jusqu'à ce qu'il lui parle des interrogations le hantant la concernant. Elle se tourna vers lui

« Pour ma part, il y a bien longtemps que je l'avais comprit. Vous adorez me voir souffrir. »

Il jouait avec elle comme un chat avec une souris blessée et bien qu'elle en était consciente, cela ne rendait pas les choses moins douloureuses. Elle lança un regard vers le clerc s'adressant à lui et eu l'impression qu'il s'était écoulé beaucoup de temps entre l'avertissement et le moment qu'il se conforme à cette demande. Elle ne put retenir un frisson de dégoût alors qu'il caressait sa joue et le regard qu'elle lui offrit mélangeait la colère liée au fait qu'il ait osé la touché à la crainte de ce qu'il allait lui demander. Faim ? Jamais elle ne tuerait un homme d'église, elle préfèrait en mourir à la place. Faire plaisir à son sire ? Il ne lui avait pas ordonné et Alice joua sur cette erreur de sa part.

« Sauvez-vous mon père et armez-vous d'argent. »

Elle se doutait que l'ordre arriverait rapidement et si c'était le cas, elle la combattrait du mieux qu'elle le pouvait jusqu'à ce qu'elle n'est d'autre choix que de rattraper avec facilité l'homme qui avait eu le temps de s'armer d'argent et d'eau bénite. Alice savait qu'il avait tout pour la tuer et un sourire se dessina contre son visage. Soit elle perdait cette malédiction d'éternité, soit Gideon changeait d'idée et lui demandait d'arrêter. Sa vie était entre les mains de son sir et elle esperait qu'il choisisse de la laisser être punie pour son entêtement, une punition qu'elle accueillerait avec plaisir. Alors qu'elle approchait ses crocs du coup de l'homme de religion, il entoura son cou d'une lourde chaine d'argent et un hurlement à la fois sinistre et libérateur quitta ses lèvres.

La douleur était absolument terrible et elle sentait son cou être déchiré lorsqu'une force vint la séparer de l'homme de foi et l'empêcher à nouveau d'atteindre le salut, mais d'une façon délicate qu'elle ne put s'empêcher de remarquer. Pourquoi est-ce que les seuls moments où il avait cette douceur était lorsqu'il l'empêchait d'être heureuse. La blessure de son cou se résorbait peu à peu et la douleur diminuait. Elle le sentit blottir leurs corps l'un contre l'autre mélangeant la sensation rassurante que ressentait habituellement les infants devant une telle proximité avec leur sire à la terreur et au dégoût que lui inspirait le sien pour toutes les choses qu'il lui avait fait subir. Elle rouvrait les yeux desquels s'étaient écoulés de longues larmes de sang et son regard se planta dans le sien malgré elle alors qu'elle recevait un nouvel ordre, perdait une nouvelle opportunité de pouvoir aller rejoindre le seigneur qu'elle chérissait tant.

« Pourquoi.... Vous n'avez personne d'autre à torturer ? »

Son regard ne quittait pas celui du vampire alors que sa blessure était presque disparue. Elle avait soif, terriblement soif, son énergie s'était entièrement dépensé à résister pour permettre aux prêtes de survivre et à soufrir pendant que la chaine encerclait son cou.

« J'aimerais du sang synthétique... Laissez moi simplement boire du sang synthétique... »

Elle ne voulait pas lui présenter ses "poches de sang". Elle avait une bonne entente avec ses humains et ne voulait pas qu'il détruise tout, en dernier recours, elle devrait donc ce rabattre sur cette mixture qu'elle avait du mal à supporter. Elle souhaitait seulement qu'il la laisse faire, qu'il lui donne une pause de seulement quelques minutes pendant lesquels il ne la torturerait pas davantage. Alice n'avait pas bougé. Leurs corps l'un contre l'autre lui faisait le plus grand des biens. Elle jalousait les vampires ayant une bonne entente avec leur sire, elle se disait que l'éternité devait être tellement moins cauchemardesque lorsqu'on n'errait pas seule. Mais on ne choisissait pas son sir....

Alice ne comprenait rien... absolument rien. Elle se contentait de rester muette, restant dans l'incompréhension, craignant la répondre qu'elle pourrait avoir si elle prenait la liberté de poser une autre question. Elle fut rattrapée par la réalité lorsqu'il lui demandait si elle était sérieuse.

« Je ne veux pas tuer... Je ne tuerai pas pour toi. »

Et pourtant elle savait qu'il avait le pouvoir de l'y forcer. De nouvelles larmes opaques coulèrent de ses joues lorsqu'il lui refusa cette simple demande. Elle le suivit sans porter attention où il la trainait. Elle se laissa asseoir n'ayant même pas la force de tenter de fuir. Lorsqu'elle le vit revenir, elle regarda à peine l'homme docile qu'il avait amené avec lui. L'homme se positionna devant elle, lui offrant un plein accès à son cou. Regardant la peau, elle s'approcha doucement, forcée par l'ordre et embrassa avec délicatesse la peau, comme si cela pouvait changer quelque chose. Après avoir apprécié la sensation de la palpitation contre ses lèvres, elle planta ses crocs et laissa le délicieux sang apaiser sa faim. Elle lâcha un soupir de féliciter et de contentement, sentant qu'elle avait suffisamment de force, elle s'arrêta, utilisant son sang pour faire disparaitre les marques de sang. Elle profita du fait qu'il ne lui avait pas ordonné de le tuer et espérait qu'il ne changerait pas d'idée.

« J'ai bu maintenant. Vous êtes content ? »

Doucement, elle passa sa main contre ses lèvres essuyant les dernières gouttes.

« Rassurez-moi, vous ne comptez pas rester ici longtemps ? »

Alors qu'elle avait terminé de poser la question, elle avait espérer qu'il réponde qu'il n'était que de passage et qu'il avait justement mieux à faire ailleurs, mais il vint plutôt prendre place à ses côtés et Alice le regarda avec un air de dégoût profond. Gâcher une nuit ? Sa nuit l'était déjà amplement et il y avait bien longtemps qu'elle avait cesser de s'accrocher aux paroles de son créateur, elle était certaine qu'il n'était pas sincère. Gideon Curtiss n'appréciait rien.

« Je ne crois pas que vous soyez capable d'apprécier quoi que ce soit. »

Alice savait que son seigneur était pour le pardon, mais elle était presque certaine que cela ne s'appliquait pas aux créatures de la nuit et encore moins à un vampire comme son sir. Elle était incapable de croire et s'en sourire et n'avais aucune envie de lui dire les endroits auxquels elle tenait le plus. Consciente que si elle ne répondait pas il la forcerait, elle décida de prendre les devant.

« Et bien vous connaissez déjà mon lieu de prière favorite pour l'avoir souillé. »

Il était certain que la vampire allait se cherche une nouvelle église dans laquelle aller faire ses prières.

« Sinon il y a les rochers du Parc National dont je ne me lasse pas, ma galerie..»Alice passait presque tout son temps à peindre. L'immortalité pouvait être longue si on ne se stimulait pas l'esprit, mais elle ne pouvait s'empêcher de souhaiter que son créateur lui retire ce plaisir. Pourtant, d'en parler avec lui était plaisant malgré tout, parce qu'elle était "biologique" liée à son créateur et qu'elle n'était pas libérée. « et ce petit bar qui diffuse de la musique ancienne ... enfin ancienne pour les humains, mais c'est ce qui se rapproche le plus des chansons que... enfin de mon vivant. »

Elle n'allait certainement pas lui parler de cette vie qu'elle aimait tant et que la chasse au sorcière lui avait volé. De ses chansons qu'elle avait apprise avec sa grand-mère et sa mère pendant qu'elle préparait la nourriture pour l'hiver. Avant de mourir, sa grand-mère lui avait demandé de chanter pour elle car elle adorait sa voix. En grandissant, sa mère et elle avait continué cette tradition instaurée par sa grand-mère et elles chantaient en faisant les travaux ménager. Alice n'avait pas chanté depuis sa transformation, elle ne voulait pas savoir l'impact qu'avait eu de perdre son âme sur sa voix.

Alice tenta tant bien que mal de proteger son corps du regard insistant de son créateur avec ses bras, rendant sa vue plus difficile à certains endroit. Elle ne le remercia pas de ce qui devait être un compliment, peut-être était-ce le regard insistant qui rendait ce commentaire aussi déplacé ou le simple fait d'entendre ce genre de commentaire quitter les lèvres de son sire.

Elle ne tourna la tête vers lui que lorsqu'il lui parla de cet endroit recherché avec une voix calme et douce à laquelle elle n'était pas habituée. Elle chercha un instant, un endroit où l'amener sans lui faire découvrir un qui lui était cher et pourtant il l'a devança, lui demandant de la mener jusqu'à chez elle. Son regard se porta sur lui, craintive, réticente, elle savait qu'elle n'avait pas le pouvoir de lui refuser et pourtant elle n'en avait aucune envie.


« Je n'ai qu'une seule chambre protégée du soleil. »

Le simple fait de l'amenée dans ce lieu qui lui appartenait lui déplaisait, mais elle voulait mettre les cartes sur table et lui dire qu'il devrait partir au levé du soleil. Elle n'avait nul part où le loger et cette simple idée la détendait, il n'aurait pas le choix de partir, son calvaire pourrait prendre fin.

« Allons-y. »

Le quartier ne fut pas bien long à atteindre pour des vampires et il se retrouvèrent devant une maison ancestrale transformée en duplex. Les pas d'Alice menèrent Gideon jusqu'à la porte située à l’extrême gauche et elle entra l'invitant à la suivre. Sans lui proposer de faire le tour de la demeure, elle se dirigea vers le salon allumant quelques lumières sur son passage et elle prit place contre le fauteuil. Son manque d’enthousiasme à le recevoir dans ce lieu qui lui était cher était facilement perceptible. La maison avait conservé son style de l'époque et c'était ce qui avait fait craquer Alice. Elle avait seulement fait modifier sa chambre occupant la majeure partie du sous-sol afin que la lumière ne s'y infiltre pas.

« Pourquoi ce tête à tête ? »

Elle ignorait ce qui l’inquiétait le plus, la simple présence de Gideon ou le fait de le voir sourir... Elle avait ignore son commentaire désobligeant envers cet endroit où elle passait une bonne partie de son éternité, ce qui attira réellement son attention fut de l'entendre parler de rêve, une chose qu'elle n'avait jamais fait depuis sa transformation.

« Un vampire peut rêver ? »

C'était la seule question qu'elle avait envie de lui poser, après tout, le fait qu'il l'est lâchement abandonné faisait en sorte qu'elle ne connaissait que très peu de choses sur les vampires malgré sa condition et donc qu'elle ignorait qu'avec le temps les émotions ne feraient que gagner en importance. Après tout, la rouquine souffrait déjà énormément et il n'était certainement pas bon pour elle de savoir que cela ne ferait que s’aggraver avec le temps. Alice ne voulait pas savoir en quoi avait consisté ce rêve, convaincue qu'il s'agissait de lui ouvrir la porte sur une occasion de lui cracher au visage à nouveau.

Elle n'accorda aucune attention à cette nouvelle insulte, elle prenait même comme un compliment le fait qu'il la trouve ennuyante, après tout, la dernière chose qu'elle souhaitait était de lui plaire, de lui ressembler. Elle l'entendit rire, mais resta complètement de marbre.

« Dommage que vous n'ayez pas eu ce désir avant.... Je n'ai plus besoin de vous maintenant, je ne veux pas avoir à supporter votre compagnie plus souvent. »

Elle aurait aimé pouvoir le chasser ou provoquer la fin de ce lien qui les unissait, mais il était le seul à pouvoir en faire quelque chose et elle était convaincue qu'il ne le ferait jamais. Elle ne voulait imaginer le contenu de ses rêves, espèrait-il revoir cette souffrance dans son regard ? Était-ce pour ça qu'il avait ressenti ce besoin de la voir ?

« Mon visage n'a pas changé depuis notre dernière rencontre et grâce à vous, il ne le fera jamais.... Alors si vous avez un élan de générosité et que vous voulez m'aider, dites-moi ce que je dois savoir et partez. Si vous êtes ici seulement pour me rappeler à quel point vous avez rendu mon éternité infernal et bien c'est réussit. »

Elle repensait à ce bien être ressenti lorsqu'elle avait senti son corps contre le sien, elle se détestait d'avoir aimé cette sensation et pourtant elle n'avait pu s'en retenir. Elle avait envie de rester près de lui bien qu'elle souhaitait de toute ses forces le voir partir.