Cela faisait maintenant près de deux semaines qu'elle était partie loin de sa cachette secrète. Loin de son père, mari & amant. Elle savait que c'était la meilleure décision qu'elle avait pu prendre pour son propre bien et pourtant elle avait l'impression qu'on lui avait arraché une partie de son âme. Elle ne connaissait pas la vie sans lui. Il était sa vie, la raison pour laquelle son coeur battait. Il était tout et pourtant elle devait faire en sorte qu'il ne soit plus rien. Du moins qu'elle ne soit plus rien pour lui. De jour en jour son état empirait et il ne prenait du mieux que lorsqu'elle partait afin d'essayer de trouver un remède. Ça ne pouvait être plus clair. Toute cette situation était devenue difficile au point qu'elle ait un impact sur la santé de cette personne qu'elle aime le plus au monde. Toutes les crises qu'elle avait, les blessures qu'elle lui faisait... Juliet savait qu'elle avait fait la bonne chose, elle l'aimait assez pour reconnaître qu'il était temps de le laisser partir. L'oubliette était d'ailleurs le dernier sort qu'elle avait lancé, s'effaçant de sa mémoire à jamais. Elle savait que si elle s'était contentée de disparaitre, il l'aurait chercher. Aujourd'hui il pouvait vivre heureux dans cette villa qui avait été la leur,  loin de se douter qu'il avait déjà eu une fille... qu'ils avaient déjà été mariés.

Juliet avait visité de nombreux endroits avant de prendre la décision de retourner vers ce qui ressemblait le plus à une maison. Boston. La ville de Régina, mais aussi et surtout celle de Théodorus. Son respect et son affection pour son oncle avait augmentée énormément lors de cette courte rencontre et elle avait besoin de le revoir, de sentir sa présence et d'avoir ses conseils éclairés. La voyante frappa quelques coups contre la lourde porte, espérant qu'il soit présent et qu'elle ne le dérange pas. Ses yeux étaient encore bouffi vu toutes les larmes qu'ils avaient laissés échappé et son corps étaient encore plus frêle qu'à l'habitude. Pourtant malgré tout elle était bien plus forte qu'elle même l'aurait cru. Le temps où elle s'enfermait dans une chambre à pleurer sa douleur semblait être résolu. Elle voulait continuer d'avancer, de vivre.

Un petit être vint ouvrir la porte et la conduisit jusqu'à un salon où la personnalité de Théodorus semblait refléter partout. Prenant place dans un fauteuil, elle confirma à l'elfe de maison qu'elle allait attendre le maître des lieux. Une fois la petite créature partie, Juliet laissa échapper un soupire. Cela lui faisait du bien d'être dans ce salon dans lequel sa mère s'était autrefois trouvée. La jeune femme avait beau ne pas partage le point de vue des fondateurs, elle commençait à considérer l'idée de s'établir en leur sol. D'être prêt du dernier membre de sa famille à qui elle pouvait parler et de celle qu'elle avait toujours considéré comme une tante lui semblait une bonne idée en attendant qu'elle parvienne à reprendre sa vie normalement.

Juliet fut sortie de ses pensées lorsque Théodorus fit son arrivé dans la pièce.

« Bonjour mon oncle... Désolée de débarquer ainsi à l'improviste. J'espère ne pas déranger. »


   

Sa simple présence suffisait à lui apporter un peu de réconfort dans ce monde qui s'écroulait autour d'elle. Juliet était consciente que son sourire ne parviendrait surement pas à lui faire croire qu'elle allait bien, mais de toute façon elle n'avait aucunement envie de lui mentir, au contraire. Théodorus était l'une des dernières personnes en qui elle avait véritablement confiance et elle n'était pas ici uniquement parce qu'elle avait besoin de sentir une présence auprès d'elle, mais bien parce qu'elle avait besoin de sa présence. Son soutien. Elle se sentit une douce chaleur l'envahir alors qu'il lui confirmait qu'elle était chez elle et qu'elle ne le dérangeait pas. Savait-il à quel point elle avait besoin d'entendre ses paroles ? Elle l'ignorait, mais pour la première fois depuis qu'elle avait quitté Victor, Juliet voyait autre chose que de la noirceur et de la souffrance. Son regard restait accroché à lui alors qu'il prenait place à ses côtés. Naturellement, l'une de ses mains vint chercher celle de l'homme, enroulant ses doigts frêles autour des siens.

« Merci mon oncle. »

Juliet parvenait sans difficulté à comprendre toute l'affection que sa mère avait eu pour son frère. Elle était consciente qu'il était bien loin d'être une petite bête sans défense, mais elle voyait quelque chose de sincèrement bon derrière les nombreux côtés sombres de l'homme. La jeune femme savait à quel point il pouvait être craint et était consciente que ces gens avaient raisons de le faire, mais elle était convaincue qu'il ne lui ferait jamais le moindre mal. Juliet baissait pourtant les yeux lorsqu'un picotement s'y fit sentir. Elle avait besoin d'en parler et en même temps c'était terriblement douloureux. Elle aurait eu envie de pouvoir effacer cette peine en un claquement de doigt, mais elle savait que c'était impossible sauf si elle lui demandait de retirer ses souvenirs concernant son père et bien qu'elle y ait songé plus d'une fois, elle n'arrivait pas à s'y résoudre. Elle ne voulait pas l'oublier...

« Oui je... Ma vie de fugitive est terminée. On vient m'installer à Boston... Le bébé et moi. »

Disait-elle en caressant doucement son ventre qui commençait à s'arrondir. Le petit être qui était entrain de s'y former depuis quatre mois lui provoquait quelques désagrément, mais jusqu'à présent Juliet adorait sa grossesse. L'idée qu'elle forçait l'enfant à vivre sans père lui provoquait un vif pincement au coeur, mais elle croyait du plus profond de son être qu'elle serait capable d'être une bonne mère. Elle était prête à tout pour ce bébé. C'était pour lui qu'elle tentait de continuer de garder un bon rythme de vie, de manger, de dormir.

« Victor est resté en Amérique du Sud et il ne reviendra pas. Il a été très malade dernièrement, en grande partie causé par le stress auquel je l'exposait et les blessures que je lui faisait. J'ai tout tenté, mais j'ai dû me résoudre à la terrible vérité. »

Disait-elle la voix cassée par l'émotion alors que l'un des rares larmes peuplant encore son corps serpentait contre sa joue.

« Nous nous détruisons l'un l'autre. Je suis dangereuse pour lui et si je voulais qu'il soit heureux je devais partir. J'ai fais en sorte... qu'il oublie mon existence. »

Se penchant doucement vers Théodorus, Juliet venait déposer sa tête contre son bras. Elle espérait qu'il ne tente pas de la convaincre de retourner vers lui et de continuer de se battre pour trouver un moyen d'arranger les choses, elle avait déjà tout essayer. Ce dont elle avait réellement besoin était de se faire dire ce qu'elle avait parfois du mal à croire : Qu'elle était capable de vivre sans lui ou du moins qu'elle était capable de l'apprendre. Juliet ignorait si elle allait conserver l'entreprise de conseil Yaxley et la mettre en place à Boston. Une partie d'elle en avait envie, elle avait adoré ce travail, mais en même temps elle ne pouvait s'empêcher de se demander s'il ne serait pas mieux qu'elle se lance dans un projet complètement différent... La jeune femme avait espoir qu'elle pourrait trouver en partie réponse à ses questions en sa compagnie.



   

Juliet retirait doucement sa tête, son regard toujours posé contre le sol, elle le vit quand même se lever pour venir s'accroupir face à elle. Le geste de sa main contre sa joue afin d'essuyer sa larme la fit sourire. Elle se sentait réellement mieux depuis qu'elle était auprès de lui, Juliet n'avait pas l'intention de s'imposer, mais elle profitait de cet instant en sa compagnie qui agissait réellement comme un baume sur son coeur brisé. Suivant le mouvement de sa main, elle relevait la tête en sa direction, posant son regard dans le sien. La sincérité dans sa voix alors qu'il lui précisait qu'elle n'était pas dangereuse la touchait beaucoup et lui donnait envie d'y croire même si cela risquait de prendre du temps. Elle pouvait voir qu'il croyait en elle et de se faire confirmer qu'elle avait prit la bonne décision la rassurait. Juliet aimait sa défunte mère de tout son coeur, mais d'entendre qu'elle était plus courageuse lui apportait un soulagement qu'elle gardait secrètement pour elle. La future mère avait pu voir ce qui était véritablement arrivé à sa mère, cette façon avec laquelle elle en était venu à vouloir sa mort. Depuis qu'elle avait apprit être enceinte, elle avait eu peur de faire comme elle et de s'en prendre à son enfant. Juliet n'en voulait pas à sa maman, au contraire elle se sentait même coupable du mal qu'elle avait dû lui faire lorsqu'elle avait eu ses visions du futur, mais elle savait qu'elle ne pourrait jamais se pardonner si elle faisait le moindre mal à l'enfant qui grandissait en son ventre.

« Merci. »

Disait-elle simplement et avec un grande sincérité en regardant toujours son oncle dans les yeux. Il y a peu elle lui avait quelque fois seulement, mais depuis sa visite en Amérique du sud, elle avait découvert un peu plus sur cet homme à qui elle accordait de plus en plus d'importance et de respect. Juliet était consciente de le connaître encore très peu, mais elle croyait sincèrement pouvoir lui faire confiance et son avis avait encore plus d'importance à ses yeux maintenant. La jeune femme ne cacha pas sa surprise en l'entendant lui ouvrir les portes de sa demeure, en fait, leur ouvrir les portes. Juliet se sentait bien chez son oncle et l'idée avait vraiment dequoi la réjouir, elle savait qu'ici avec lui et les elfes lorsqu'il s'absente, elle ne serait jamais complètement seule.

« Je ne veux surtout pas m'imposer. »

Mais son oncle lui fit rapidement comprendre que sa décision était prise ce qui eut pour effet de sécher ses larmes davantage. Elle sentit son coeur accélérer en l'entendant lui dire qu'elle allait dormir dans la chambre de sa mère. Jamais n'y avait-elle mis les pieds et elle se demandait si elle pourrait y trouver des souvenirs d'elle, elle avait espoir que oui.

« Je n'ai besoin de rien d'autre pour le moment. Mes affaires ne sont pas avec moi, mais je t’appellerai quand je les aurai apportées. »

Juliet avait toujours adoré ses créatures, mais elle était bien décidée à garder une certaine distance avec elle cette fois pour ne pas agir trop à l'encontre de la façon avec laquelle Théodorus les traitait. Après tout, elle ne voulait surtout pas que sa présence l’agasse. Elle la regarda partir et se retourna en direction de son oncle ensuite. Sa petite mise en garde l'amusait, mais elle la prenait néanmoins très au sérieux. Elle ne souhaitait pas être envahissante et ne voulait surtout pas le déranger.

« Merci encore mon oncle... Pour tout. Nous te serons toujours reconnaissantes pour ce que tu fais pour nous et je te promet que tu ne remarquera pas trop ma présence. Si je peux faire quoi que ce soit pour te remercier... N'hésite pas. »

Se levant du fauteuil, elle allait le serrer dans ses bras. Blottissant sa tête au creux de son cou, la douleur était toujours là. Juliet savait qu'elle n'allait pas rapidement disparaitre, en fait elle craignait qu'elle ne disparaisse jamais, mais au moins grâce à lui elle n'avait plus l'impression d'être seule. Embrassant sa joue, elle se reculait légèrement. Elle avait toujours été très affectueuse et avait besoin de toucher et d'être touchée. Elle ignorait par contre si son oncle était à l'aise et ne souhaitant surtout pas le déranger alors qu'elle venait à peine d'arriver, elle se promis d'y faire attention et de se trouver quelqu'un d'autre à câliner si ça le rendait inconfortable.

« Le simple fait d'être ici me donne plus de force pour continuer de me battre. Ça fait tellement mal... mais de voir que tu crois en moi m'aide énormément. Si tu as un peu de temps, tu veux bien m'accompagner dans la chambre de maman ? Je t'avoue être curieuse. »

Elle ne savait pas ce qu'il était à faire avant qu'elle n'arrive et elle ne voulait pas le retarder, mais l'idée de l'avoir avec elle pour lui faire découvrir ce lieu lui ferait vraiment plaisir. Elle avait bien entendu lorsqu'il lui avait dit avoir ses secrets et de mettre son nez où il ne fallait pas était la dernière chose qu'elle voulait faire, c'est pourquoi elle avait envie d'être près de lui pour y faire sa première visite, pour ainsi savoir s'il y avait des choses qu'elle contenait qu'elle ne devait pas regarder, car dieu sait que Juliet comptait fouiller le moindre recoin de cette chambre afin de ne pas manquer le moindre souvenir appartenant à sa mère. S'il y avait des choses qu'il ne voulait pas la voir regarder, il était mieux qu'elle le sache avant qu'il ne soit trop tard.


   

Juliet ne pouvait s'empêche d'admirer le moindre détail de la demeure de son oncle. Elle était magnifique et transpirait le luxe. Cela changeait drastiquement des lieux dans lesquels elle avait dormit depuis la fuite du domaine qu'elle avait habité avec son père pendant tant d'années. Leur refuge au fond des bois était charmant et ils avaient su en faire un nid douillet, mais il n'en demeurait pas moins d'un luxe très inférieur. Elle se sentait bien ici, peut-être parce qu'elle savait que sa mère avait déjà plus d'une fois arpenté chacun de ses couloirs. Peut-être était-ce parce qu'elle se sentait bien en compagnie de Théodorus... Ou peut-être était-ce simplement un mélange des deux raisons. Alors que son oncle lui demandait si elle avait réfléchi à des noms, elle ne pouvait s'empêcher de sourire.

« Pas encore non. Je veux attendre de le tenir dans mes bras. Voir ce qu'il m'inspire. »

Elle était certaine qu'au moment où son regard allait croiser celui de l'enfant qui grandissait en elle, elle saurait avec certitude qu'elle nom lui donner. Il était vrai qu'il lui arrivait de remarquer des prénoms qu'elle trouvait particulièrement charmants ou qui signifiaient quelque chose à ses yeux, mais aucun d'eux n'avaient su se forger une avance sur les autres. Le regard de Juliet suivait les indications de son oncle, remarquant la direction menant à sa chambre pour ensuite se concentrer sur celle dans laquelle il lui permettait l'honneur d'y loger. Curieuse, elle regardait la porte s'ouvrir devant ses yeux non sans esquisser un sourire. Alors qu'il l'invitait à entrer, elle le suivait sans hésiter. Les sentiments qui affluèrent en elle par la suite étaient difficile à décrire. C'était comme si, elle entrait dans le monde de sa mère lorsqu'elle était plus jeune et qu'à chaque moment elle pouvait faire son entrée à sa tour. Juliet avait le regard brillant alors que Theodorus lui confirmait qu'elle pouvait laissé sa curiosité explorer le moindre coin de cette chambre. Elle n'aurait pas oser le faire s'il ne l'y avait pas autorisé. Sa générosité envers elle la touchait sincèrement et lui donnait effectivement l'impression d'être de retour à la maison.

« Ça ne pourrait pas être mieux... »
 
Délaissant la fenêtre et la vue magnifique qui s'étendait de cette dernière, elle retournait de son oncle toujours adossé contre le bureau. Elle qui avait passé une grande partie des derniers jours et même des dernières semaine à pleurer avait désormais un visage serein et un sourire qui trahissait à quel point tout ce qui s'était passé depuis qu'elle avait cogné à cette porte était plus merveilleux que ce qu'elle avait imaginé. L'idée qu'elle puisse aménager une chambre à cette petite merveille qui viendrait faire son apparition dans sa vie d'ici quelques mois avait de quoi la réjouir. Enlaçant ses bras autour de lui, elle posait sa tête contre son épaule et prenait le temps de longuement inspiré. Elle ne savait pas s'il réalisait à quel point il faisait beaucoup pour elle.

« Je ne veux pas prendre d'avantage de ton temps. »

Se reculant légèrement, elle gardait néanmoins une très mince distance entre eux.

« C'est parfait. Merci pour tout, sincèrement. J'ai bien besoin de me détendre, je vais aller me doucher et ensuite je vais profiter de cette chambre. »

Après ses remercient, elle déposait un léger baiser contre la joue de Théodorus et s'éloignait légèrement, lui demandant la direction à suivre vers la salle de bain avant de le laisser partir. Elle ne voulait pas que sa présence le gène et bien qu'elle savait d'avance qu'elle aurait besoin de passer du temps avec lui, elle voulait réellement faire attention, craignant qu'il ne change d'idée et lui demande de partir. Une fois seule, elle se dirigeait tel que prévu vers la salle de bain dans laquelle elle resta longuement, se reposant dans l'eau chaude, convaincue que cela ferait le plus grand bien à la merveille qui grandissait en elle. Lorsqu'elle quitta enfin, elle retourna dans la chambre et s'installa contre la chaise du bureau, ouvrant le premier tiroir afin d'en apprendre d'avantage sur cette femme qui avait quitté sa vie bien trop tôt.